Bruxelles vient de présenter sa feuille de route pour le développement de la finance verte dans la zone euro, en prenant en compte les critères environnementaux dans la valorisation des investissements. Une bonne nouvelle pour le secteur de l’énergie engagé dans la transition écologique. 

La transition énergétique nécessite de lourds investissements, et cette révolution n’est possible qu’en impliquant le secteur de la finance mondiale : « Il est vital pour nos économies de réconcilier rapidement les modes de financement avec les objectifs climatiques. (…) II est nécessaire et urgent de réinvestir le champ prudentiel pour assurer le financement de l’économie verte et de la lutte contre le réchauffement climatique, en y faisant figurer des critères macroéconomiques favorables à l’environnement. » exposent ainsi les économistes Abdeldjellil Bouzidi, Alain Grandjean et Mireille Martini, dans la synthèse de leur étude Régulation financière et urgence climatique.

« Réconcilier rapidement les modes de financement avec les objectifs climatiques »

Certes, l’évolution des choix des investisseurs est plutôt encourageante, comme le souligne Xavier Girre, Directeur exécutif en charge de la direction financière groupe chez EDF : « Les acteurs du financement de l’économie privilégient de plus en plus les investissements qui favorisent une croissance bas carbone. Ils intègrent désormais dans leurs choix d’allocation des critères environnementaux, sociaux, sociétaux et éthiques. »

En effet, les obligations vertes (« green bonds » en anglais) sont en pleine expansion au niveau mondial : en novembre 2017, l’émission des green bonds a dépassé la barre des 100 milliards de dollars, selon l’ONG Climate Bonds Initiative. Un chiffre à pondérer, tout de même : ces obligations vertes ne représentent même pas 1% des obligations émises au niveau mondial.

179 milliards d’euros d’investissement manquent pour la transition énergétique en Europe

Quoiqu’il en soit, les investissements verts demeurent insuffisants pour répondre aux défis qu’impose une transition énergétique réussie, notamment dans l’Union Européenne : « L’écart entre le besoin en financement climat et l’offre actuelle se chiffre à 179 milliards d’euros par an. Cette somme ne pourra être compensée par les seules finances publiques, il faut la participation du secteur financier privé. »  exposait ainsi le vice-président de la Commission européenne Valdis Dombrovskis pendant le One Planet Summit, le 12 décembre 2017.

Consciente de cette réalité, l’Union Européenne travaille depuis 2015 à un cadre incitatif plus fort en direction de la finance verte. Le 8 mars 2017, la Commission a présenté son « plan d’action pour financer la croissance durable », qui doit encore être validé par le Parlement et le Conseil européens – mais dont les propositions sont encourageantes.

L’Union propose un « plan d’action pour financer la croissance durable »

L’ambition de ce plan  n’est pas d’aborder la finance verte comme un marché de niche, mais bien de transformer l’ensemble des acteurs financiers », explique Pascal Canfin, directeur du WWF France, un des quatre experts français intégrés au groupe de travail de la Commission.

Dans le détail, le plan propose d’obliger les acteurs financiers à prendre en compte les questions environnementales dans leurs politiques d’investissement, en définissant des contraintes et des mesures incitatives. Autre proposition : définir une « langue commune de la finance durable », pour classer les produits financiers en fonction de critères climatiques, environnementaux et sociaux.

La Commission prône également la création d’un standard européen pour les produits financiers verts et, point capital, la modification de la directive sur les agences de notation afin qu’elle prenne en compte les enjeux de long terme et la soutenabilité.

Cette feuille de route est également une manière pour la Commission de pousser les acteurs financiers à sortir du bois : « Dix ans après la crise financière, on va voir s’ils ont changé leur mode de fonctionnement, s’ils sont au rendez-vous de l’urgence climatique », déclare Pascal Canfin.