Alors que l’Europe et la France font de la transition écologique un volet majeur de leur plan de relance économique, le succès d’une relance verte reposera en grande partie sur un investissement accéléré dans les smart grids, estime Think Smartgrids.
La crise sanitaire et les mesures de confinement ont offert un répit aussi bref qu’inespéré à la nature. L’arrêt des activités industrielles, des transports et d’une partie de la production d’électricité devrait ainsi, selon l’Agence internationale de l’énergie (AIE), entraîner une diminution, sans précédent, de 8% des émissions mondiales de gaz à effet de serre (GES) en 2020. Dans le même temps, selon le site Carbon Brief, les productions solaires et éoliennes ont atteint au mois d’avril une part record, de 23% de la production d’électricité européenne.
Autant de bonnes nouvelles qui pourraient faire de l’année 2020 la première au cours de laquelle les termes de l’Accord de Paris, visant à limiter l’augmentation de la température globale à 1,5°C, pourraient être respectés. « Le paradoxe de cette crise (…) est que pour la première fois, nous respectons les objectifs de l’Accord de Paris (…) non pas grâce à des mesures de politique climatique, mais en raison de mesure de protection sanitaire », analyse François Gémenne, spécialiste en géopolitique de l’environnement.
Problème : transitoire, la chute des émissions de GES ne suffira pas à inverser le réchauffement climatique. Et la reprise des activités économiques pourrait, comme en 2010, causer un rebond fulgurant des émissions de GES. « La baisse historique des émissions mondiales n’est absolument pas réjouissante », déplore ainsi le Dr Fatih Birol, le directeur de l’AIE.
Orienter le monde vers un avenir énergétique plus résilient
Le défi de la décarbonation reste donc entier. Pour le Dr Birol, il appartient aux gouvernements de « tirer des leçons (…) en plaçant les technologies énergétiques propres – énergies renouvelables, efficacité, batteries, hydrogène et capture du carbone – au cœur de leurs plans de relance économique. Investir dans ces domaines peut créer des emplois, rendre les économies plus compétitives et orienter le monde vers un avenir énergétique plus résilient et plus propre », prédit encore le chef de l’AIE.
Est-ce à ce changement de paradigme que conduira le plan de relance de l’Union européenne adopté le 21 juillet dernier ? Pour Simone Tagliapietra, chercheur au centre de réflexion européen Bruegel/Bruxelles, il s’agit en tout cas du « plan de relance le plus écologique au monde ». Les dirigeants européens se sont accordés sur un budget de 1 800 milliards d’euros, dont 30% sera alloué à la lutte contre le réchauffement climatique. « Cela signifie que, sous différentes formes et à différents moments, entre 2021 et 2027, environ 547 milliards d’euros de fonds européens seront mis à disposition pour la transition écologique sur tout le continent.» analyse Simone Tagliapietra, qui voit dans le plan européen un pas décisif fait dans la direction d’un continent plus vert. « Ce montant est significatif, car il représente environ un quart des investissements nécessaires pour poursuivre les objectifs du “pacte vert” européen et il peut susciter des investissements supplémentaires de la part des gouvernements et du secteur privé. » fait-elle valoir.
Plan de relance français : 30 milliards consacrés à l’écologie
Du côté de l’Hexagone, le ministre de l’Economie Bruno Le Maire a annoncé que le plan de relance économique tricolore consacrera quant à lui 30 milliards d’euros à la transition écologique, sur 100 milliards au total. « Nous veillerons à ce que toutes les décisions de relance favorisent un nouveau modèle de croissance fondé sur la décarbonation, la sobriété énergétique et les innovations vertes. » a-t-il commenté. Trois secteurs ont ainsi été identifiés comme prioritaires : la rénovation énergétique, les transports et l’énergie. Au-delà de sa contribution à la baisse des émissions de CO2, la relance verte doit aussi être synonyme de création d’emploi pour Bruno Le Maire, qui estime que la transition écologique sera ainsi mieux acceptée par les Français.
Investir dans les réseaux intelligents
C’est aussi en ce sens que tendent les préconisations partagées par Think Smartgrids, pour qui le succès de la relance verte reposera en grande partie sur un investissement accéléré dans les réseaux intelligents. L’association a partagé une liste de 14 recommandations concrètes visant à conforter le leadership de la France dans la lutte contre le réchauffement climatique et à renforcer le développement économique des territoires et les créations d’emplois. Think Smartgrids propose ainsi d’accélérer le déploiement des infrastructures de recharge des véhicules électriques ; d’agir par les smart grids et la digitalisation sur la décarbonation des bâtiments ; de développer la transition énergétique, la résilience énergétique et la performance industrielle des territoires par la combinaison “Télécoms temps réel – Smart Grids” ou encore de déployer le stockage pour les réseaux et les énergies renouvelables.
Autant de mesures qui participeront pleinement à la transition énergétique, ainsi que le souligne Marianne Laigneau, nouvelle Présidente de l’association : « La crise sanitaire a montré de nouveau le rôle essentiel de la filière des réseaux électriques dans la vie économique de notre pays. Après plusieurs années d’expérimentation des Smart Grids, la maturité des solutions numériques, combinée aux progrès effectués dans les technologies de l’énergie, ont créé les conditions du déploiement à l’échelle industrielle des réseaux intelligents. Nos sociétés européennes seront au rendez-vous de l’impératif de neutralité carbone à 2050 en développant les Smart Grids, et la France peut montrer l’exemple ».