L’île de la Réunion est un territoire d’expérimentations fécondes pour les logiques énergétiques de demain. L’île ambitionne d’atteindre le 100% renouvelable dès 2030 : la plateforme de pilotage smart grid GYSOMATE est un outil clé de cette volonté.
L’île de la Réunion est une Zone Non Interconnectée (ZNI) du territoire français : étant une île, elle n’est pas connectée au réseau électrique national, ce qui la rend historiquement dépendante des combustibles fossiles. Mais la Réunion a largement entamé sa révolution énergétique, exploitant largement le potentiel hydro-électrique de l’île, déployant à grande échelle l’éolien et, surtout, le photovoltaïque.
Passer de 35% de renouvelables en 2017 à 100% en 2030
La Réunion est le département français dont la part de renouvelables dans le mix énergétique est le plus élevé, avec 35%. L’objectif est d’atteindre les 50% en 2020, et l’autonomie renouvelable totale en 2030 : à cette date l’île ne devrait plus importer le moindre combustible fossile pour sa production électrique et n’utiliser que de l’énergie renouvelable produite localement.
Pour cela, la Réunion veut basculer vers une nouvelle logique de rapport à l’électricité, couplant une part très élevée d’énergies renouvelables intermittentes (photovoltaïque et éolien) avec des solutions de stockage de grande capacité. Les objectifs d’énergies renouvelables dans le mix électrique sont fixés par décret, pour toutes les ZNI, à 30%. L’excellence de ses systèmes de stockage (notamment la batterie Na-S de Saint-André) a permis à la Réunion de faire passer cette limite à 32%.
La Réunion se lance dans un nouveau projet de recherche. Pour préparer l’île entière à fonctionner sur ce principe, la Réunion s’engage dans les micro-grids.
Des micro-grids au service des zones non connectées mais aussi en milieu urbain
C’est le cas, assez logiquement, des zones non connectées au réseau de l’île. Un des projets exemplaires de la Réunion en ce domaine est le micro-grid du cirque de Mafate, une zone isolée : combinant une centrale photovoltaïque, des batteries Lithium-Ion et une unité de stockage utilisant l’hydrogène, le projet piloté par EDF Solutions énergétiques insulaires (SEI) et la start-up Powidian offre aux 310 familles de Mafate une électricité propre, durable et, surtout, continue. Le département veut ainsi équiper l’ensemble de ces zones isolées d’un micro-grid de ce type.
Mais l’île développe également ces micro-grids dans des zones connectées, en zone rurale mais aussi en milieu urbain, toujours sur le même principe de combiner une source d’énergie renouvelable (le plus souvent photovoltaïque) et des unités de stockage. Le but est que ces micro-réseaux fonctionnent, la plupart du temps, en autonomie, mais qu’ils puissent également, en cas de pic de production et de batteries pleines, fournir de l’électricité au réseau de l’île, ou, en cas de pic de consommation, utiliser l’électricité de ce même réseau.
Projet GYSOMATE: une plateforme pour les piloter tous
Ces micro-réseaux sont à la fois des briques du futur réseau 100% renouvelables de l’île et un modèle de ce que deviendra la Réunion. Pour atteindre cette autonomie énergétique renouvelable, l’île a besoin d’une plateforme de pilotage intelligent pour associer efficacement ces sources intermittentes et ces solutions de stockage à court, moyen et long termes.
Cette plateforme a un rôle fondamental : elle assurera les arbitrages entre les différentes sources énergétiques disponibles à un instant T (produites en temps réel, issues de l’hydroélectricité, issues du stockage), en fonction des besoin du réseau, dans le respect des contraintes techniques (puissance minimale de fonctionnement des moteurs, réserve primaire, maintien de la puissance de court-circuit).
Une expérimentation de pilotage intelligent pour les smart grids
Début octobre 2017, la Réunion a inauguré un projet de recherche, piloté par l’Université de la Réunion, avec des financements régionaux et européens : il veut démontrer qu’un Système de gestion de l’énergie (SGE) centralisé pour le pilotage de bâtiments distribués en micro-réseaux diffus peut être efficace à l’échelle de l’île.
Ce projet a été baptisé GYSOMATE, pour « Gestion dYnamique, Supervision et Optimisation de Micro réseaux pour l’Autonomie du Territoire en énergie Électrique ». GYSOMATE va à la fois expérimenter un pilotage en temps réel sur des micro-grids en milieu urbain, et développer des simulations sur le réseau de l’île, en temps réel et à plusieurs échelles.
Un outil central de l’ambition de l’Île de la Réunion
Les chercheurs pourront ainsi tester différentes stratégies de gestion de l’énergie, pour définir les meilleures options pour augmenter la part de renouvelables dans le mix : « En intégrant des systèmes distribués de production et de stockage d’énergie électrique, et la prévision de variables clés à plusieurs niveaux de la chaîne énergétique (variabilité du gisement solaire, intermittence des flux, capacités de stockage), GYSOMATE vise le développement de stratégies intelligentes de gestion de l’énergie à l’échelle de micro-réseaux urbains (small grids) en ZNI » expose le laboratoire de recherche.
Le but est de pouvoir, ensuite, appliquer ces solutions à l’échelle d’un bâtiment, puis d’un quartier, d’une ville – et enfin de l’île toute entière. Cette plateforme ambitionne d’accompagner la marche de l’île vers son autonomie renouvelable, grandissant avec elle – en devenant un outil central de l’ambition réunionnaise d’une énergie 100% propre, locale et durable en 2030.