La nouvelle a fait sensation en Allemagne : pour la première fois au monde, des parcs éoliens offshore vont voir le jour sans subventions. Ce résultat d’un appel d’offres d’ampleur a surpris jusqu’à l’agence fédérale allemande chargée de l’énergie. Cette prouesse est due pour partie à la baisse des coûts de l’éolien, pour partie au gigantisme des projets et à leur localisation. Explications.

L’Allemagne a mis en place un nouveau plan d’implantation d’éoliennes offshore en mer du Nord, baptisé WindseeG. Mi avril 2017, la Bundesnetzagentur, l’agence fédérale chargée de l’énergie et donc de l’attribution des concessions offshore, a dévoilé les lauréats du premier appel d’offres de ce plan.

C’est peu dire que les résultats ont surpris, et ce jusqu’à l’agence elle-même, qui ne s’attendait pas à pareille aubaine : pour trois parcs sur quatre, des énergéticiens ont proposé un projet sans aucune subvention publique. Une première mondiale.

De nouveaux appels d’offres lancés dans la foulée

La Bundesnetzagentur a bien évidemment attribué lesdits parcs à ces énergéticiens. Et le gouvernement a, logiquement, décidé d’organiser rapidement de nouveaux appels d’offres, pour plus de 3 GW de puissance totale, visant à renouveler des parcs éoliens offshore et onshore vieillissants, en profitant d’une conjoncture qui semble idéale.

Mais au fait, qui sont les opérateurs à l’origine de ces projets ? Le groupe danois Dong a remporté trois parcs éoliens en mer, OWP West (240 MW), Borkum Griffrund West 2 (240 MW) et Gode Wind (110 MW). Pour les deux premiers, il n’a demandé aucune subvention, et pour le troisième, une subvention de 60 euros par MWh produit.

Le quatrième projet est un champ éolien immense, nommé He Dreiht, d’une puissance totale de 900 MW, qui en fera, lors de sa mise en service, un des plus grands parcs éoliens offshore du monde. Le groupe allemand EnBW a remporté cet appel d’offres en ne demandant, là encore, aucune subvention.

Des offres hors coût de raccordement

Précisons immédiatement que les budgets présentés par Dong et EnBW s’entendent hors raccordement au réseau, qui sera assuré par le gestionnaire de réseau allemand TenneT.

Cette précision est d’importance car le raccordement au réseau électrique d’un parc offshore est toujours… coûteux, les zones de consommation se situant, par définition, loin des zones de production, et le courant devant être transporté à travers des étendues marines guère adaptées aux éventuels travaux de maintenance. Dans ce cas précis, c’est TenneT qui gérera le raccordement et la maintenance – limitant, de fait, les coûts supportés par les énergéticiens.

Malgré ce bémol, la prouesse reste impressionnante. Comment les deux groupes ont-ils pu présenter cette offre ? Plusieurs facteurs, bien entendu, entrent en jeu. Le premier est général et mondial, il concerne la baisse, constante, du coût de fabrication des éoliennes. La maturité des technologies liées à leur installation offshore participe par ailleurs à cette dynamique : les deux énergéticiens construisent des parcs offshore depuis plus de vingt ans, ils maîtrisent logiquement les contraintes et les économies possibles de ce genre de projet.

Economies d’échelle, maturité de la filière et anticipation des évolutions technologiques

Dong a même anticipé sur les évolutions technologiques à venir en la matière, en prévoyant d’équiper les trois parcs de turbines géantes de 13 à 15 MW chacune, qui ne sont pas encore commercialisées mais qui le seront en 2024 quand le groupe danois démarrera ses travaux. Dong compte également fusionner les deux champs de OWP West et Borkum Griffrund West 2 en un seul, réalisant d’importantes économies d’échelle.

De la même façon, EnBW compte profiter des « développements techniques rapides » de la filière éolienne offshore pour en faire profiter son gigantesque parc éolien. Le groupe allemand entend également faire des économies d’échelle puisqu’à l’horizon 2025, quand les travaux commenceront, il aura achevé la construction de deux parcs éoliens voisins – une synergie qui lui sera bénéfique.

Dernier facteur : la Bundesnetzagentur a étendu la durée d’exploitation des parcs éoliens de 25 à 30 ans, permettant aux énergéticiens une meilleure visibilité opérationnelle et une rentabilité accrue, qui leur a offert la possibilité de présenter des offres à coût plus réduit.