La flexibilité est une condition sine qua non de l’intégration des énergies renouvelables intermittentes dans le mix énergétique français. Et si les objets connectés étaient une des réponses possibles aux besoins des smart grids ?

La flexibilité est un enjeu d’importance des réseaux électriques pour répondre à l’intermittence des énergies renouvelables comme l’éolien ou le photovoltaïque. En effet, ces énergies ne produisent pas une électricité continue, et cette production n’est pas toujours prévisible : le vent peut varier considérablement, de très fort à nul, tout comme l’ensoleillement.

La flexibilité : stockage ou décalage de consommation

Dès lors, les réseaux électriques doivent gérer des périodes où l’électricité est en surplus par rapport à la consommation. Ces périodes durant lesquelles la production ENR n’est pas assez forte par rapport à la consommation locale. La flexibilité regroupe l’ensemble des techniques permettant de décaler une consommation ou une production d’électricité en fonction des besoins du réseau.

Ces techniques se regroupent en deux catégories : les méthodes de stockage d’énergie, qui permettent de charger un dispositif de stockage d’électricité quand la production  est importante et de les décharger quand elle est faible ; les méthodes consistant à proposer aux consommateurs de décaler des consommations vers les périodes où l’électricité est la plus abondante.

Les smart grids : piloter les équipements électriques pour augmenter la flexibilité

Actility est une start-up française spécialisée dans les solutions clés-en-main utilisant des réseaux basses consommation et longue portée pour piloter des objets connectés, notamment dans le domaine de l’électricité. Elle utilise des réseaux radio aux fréquences libres, notamment via le protocole LoRaWan, et propose capteurs et plateforme de pilotage. Cette technologie fait partie des plus utilisées pour piloter les smart grids de par le monde.

Grâce à elle, il est possible de transmettre, en fonction des besoins du réseau électrique, des « ordres » aux objets connectés. Ces ordres s’effectuent à charge ou décharge du système de stockage, baisse ou hausse de la consommation. Actility a notamment équipé 8 000 commutateurs téléphoniques du groupe Orange de batteries qui sont reliées par ondes radio LoRaWan au réseau électrique. Celui-ci peut déterminer quand ces batteries doivent être chargées (électricité produite en abondance) et déchargées (production d’électricité faible).

L’entreprise est également à la pointe de la recherche sur les systèmes de pilotage de charge des batteries de véhicule électrique. Ceci afin de privilégier la charge lorsque  l’électricité renouvelable est en abondance. Elle est aussi en avance sur l’utilisation de ces batteries pour soutenir le réseau électrique. Il s’agit d’un des chantiers majeurs de la révolution smart grids, où s’engouffrent progressivement les énergéticiens et constructeurs automobiles.

Piloter le chauffage des bâtiments publics en fonction des besoins du réseau

Concernant la flexibilité dans la consommation, Actility est également à l’origine de plusieurs réussites. Elle a notamment participé au projet Smart Grids Vendée, sur le volet dédié au chauffage électrique des bâtiments publics. Le principe est d’équiper un ensemble de bâtiments publics de capteurs de température et d’outils de pilotage des chauffages électriques. Les capteurs adaptent les températures à une température jugée « normale » ou inférieure (- 1°C, -2°C), mais confortables pour les usagers.

Le but est de pouvoir, si la production renouvelable est moins forte (ciel couvert, vent trop faible), baisser automatiquement le chauffage. L’objectif étant de soulager le réseau électrique. Une opération de ce type, effectuée sur l’ensemble des bâtiments publics d’une ville, peut offrir de substantielles économies d’énergie, sans nuire au confort des usagers. Une expérimentation couronnée de succès, qui ne demande qu’à être reproduite sur d’autres territoires.

Une intermittence des process industriels qui épouse celle des sources renouvelables

Dans le même ordre d’idée, la start-up a mis en place des partenariats avec Veolia et Enedis. Ceux-ci concernent notamment les stations d’assainissement et les usines d’eau potable. Dans un cas comme dans l’autre, le process industriel n’est pas soumis à un impératif de délais stricts.

L’eau potable ou assainie peut attendre quelques heures  avant distribution. Les stations et les usines fonctionnent donc à plein régime quand l’électricité renouvelable est abondante. Elles ralentissent, voire s’interrompent, quand la production électrique est trop faible. Les stations agissent sur « ordre » du réseau électrique intelligent, capable d’émettre ses propres diagnostics sur ses besoins.

De tels dispositifs, impensables il y a dix ans, pourraient occuper dans le futur un rôle majeur dans le mix électrique français, qui tend vers toujours plus de renouvelables. Un réseau qui se “soigne” et s’entretient tout seul? Le rêve semble presque à portée de main…