Le changement d’heure, initialement imaginé par Benjamin Franklin en visite à Paris constatant les rues désertes aux premières heures du jour, a été instauré temporairement par plusieurs pays au moment de la Première Guerre mondiale dans le but d’économiser le charbon, alors source principale d’électricité. En France, c’est en 1976, période de crise après le premier choc pétrolier, que le régime de changement d’heure est mis en place. Là encore, l’objectif annoncé était d’alléger la « facture pétrolière » alors que le nucléaire n’en était qu’à ses débuts et que l’électricité provenait essentiellement des centrales au fuel lourd.
Des débats houleux dans les années 90
Le changement d’heure a été mis en place dans une optique de réduction de la consommation d’énergie en adaptant les heures d’ensoleillement à celle des pics d’activité humaine. Le gouvernement estime ainsi qu’en 2030 « la réduction globale des émissions dues au changement d’heure pourrait être de 70 000 à 100 000 tonnes de CO2 ». Ce système n’est pourtant possible que dans certaines régions du globe et sous certains climats. Si l’Amérique du Nord a en effet également adopté ce système, l’État d’Arizona a eu l’autorisation de ne plus s’y soumettre parce qu’une heure d’ensoleillement supplémentaire ne permettait plus la baisse de la consommation d’énergie du fait de l’usage de la climatisation.
Considérant que le changement d’horaire impacte certes la consommation d’énergie et la protection de l’environnement mais également la santé publique, les conditions de travail, l’agriculture, la sécurité routière et les industries du tourisme et des loisirs, le mécanisme a cependant éveillé des critiques. L’Association « Non à l’heure d’été en France et en Europe » invoque ainsi notamment le rôle de la mélatonine, hormone naturelle du sommeil, sécrétée pendant l’obscurité pour s’opposer au changement d’heure. Un rapport du Sénat publié en 1996 avait en effet souligné la perturbation des rythmes biologiques et en 1996, Alain Juppé alors Premier ministre avait déclaré : « Il me semble que les avantages de ce dispositif sont devenus bien inférieurs à ses inconvénients. »
Vers un regain de critiques ?
Chiffres à l’appui, le changement d’heure a pourtant été adopté et harmonisé à l’échelle européenne via la directive 2000/84/CE du 19 janvier 2001, laissant s’éteindre les débats au cours des années 2000. En 2005, un sondage du Centre de recherche pour l’étude et l’observation des conditions de vie (Credoc) montrait ainsi que deux tiers des Français étaient favorables ou indifférents à l’heure d’été. Alors que l’Union européenne prône les économies d’énergies et l’efficacité énergétique depuis le lancement en 2006 de son « Plan d’action pour l’efficacité énergétique : réaliser le potentiel », la possibilité de réduction de la consommation d’énergie via ce système semble dès lors non négligeable.
Pourtant, en 2011, avec la décision de la Russie, de l’Egypte, de l’Ukraine et de la Biélorussie de sortir de ce système, les débats ont repris et dernièrement, un sondage de BVA-Orange-I-Télé affirmait que 58% des Français étaient opposés au changement d’heure et 66% ne croyaient pas que le système puisse permettre de réelles économies d’énergies. Face à ce retour des critiques et au manque de données récentes sur le sujet (la dernière étude de l’Ademe portant sur l’année 2009), Ségolène Royal a alors indiqué dans un tweet du 28 mars : « les Français doutent de l’impact sur les économies d’énergie qui en était la raison d’être. Le ministère va les vérifier ». Les économies d’énergies impliquent de repenser notre rapport au monde et au temps. Actuellement, les débats sur le changement d’heure remettent en question l’utilité de la mesure au regard de la transition énergétique.
Sources : Lemonde.fr, Ademe, Sénat, Lefigaro.fr