Le biomimétisme consiste à utiliser les « best practices » de la nature pour les appliquer à des technologies. La filière énergétique est l’un des secteurs qui s’inspire le plus de la nature. Selon Thibaud Coradin directeur recherche au laboratoire Chimie de la Matière Condensée de Paris, « la nature sait faire des choses que nous ne savons pas faire ou, à tout le moins, les fabrique de manière plus durable, c’est-à-dire sans gaspillage, sans produits toxiques et en utilisant le moins d’énergie possible, les processus ayant été optimisés au cours de l’évolution ». Quelques exemples d’innovations inspirées de la nature sur les dernières années :
Tournesol solaire/Fleur solaire, Smartflower
La Smartflower est un producteur d’énergie photovoltaïque développée par la société autrichienne Smartflower, distribuée et commercialisée en France par EDF ENR Solaire. Elle ressemble visuellement à une fleur avec douze pétales dotés chacune de 40 cellules photovoltaïques. Le biomimétisme va plus loin que le visuel car la Smartflower est aussi intelligente. Elle a la capacité de s’orienter pour s’exposer un maximum aux rayons du soleil et suit instinctivement le soleil comme une fleur à la recherche de la lumière. La Smartflower est un dispositif d’autoconsommation pour les particuliers et les professionnels qui souhaitent consommer leur production mais qui souhaitent aussi suivre leur consommation énergétique. Le grand public a pu voir la Smartflower lors des expositions « Paris de l’avenir » organisées par la ville de Paris sur les berges de la Seine en août dernier sous la bannière « Paris Climat 2015 ».
L’exposition des solutions concrètes pour le climat se poursuivra du 18 novembre au 14 décembre au bassin de la Villette (XIXème) au moment où Paris accueillera la COP21.
Arbre à vent, Aeroleaf
Mis en place par la start-up parisienne New Wind, l’arbre à vent est un arbre dont les feuilles fonctionnent comme des minis éoliennes imitant le mouvement des feuilles d’un arbre quand le vent souffle en utilisant la technologie Aeroleaf. L’idée qui a germé dans la tête de Jérôme Michaud-Larivière, fondateur de la start-up, a fait son chemin pour se concrétiser avec l’aide de chercheurs qui ont mis au point le premier arbre à vent commercialisable. Haut d’environ dix mètres et affiché à 29 500 euros l’unité, l’arbre à vent reste une innovation inaccessible surtout pour les particuliers vivant en milieu urbain. Pour s’adapter aux espaces limités, la start-up a rendu possible l’installation de quelques « feuilles » de l’arbre sur les toits ou même les voitures. Après quatre années de recherche et de développement, l’arbre à vent entre dans sa phase d’industrialisation avec à son conseil de surveillance Arnaud Montebourg.
Les premières unités produites en pré-série seront déployées afin de tester leur efficacité dans différentes conditions d’exposition au vent. Suivra la phase de production en série. La commercialisation en France est prévue pour 2016 et les premières exportations en 2017.
Arbre solaire, e-Tree
L’arbre solaire « e-Tree » est un mix de la Smartflower et l’arbre à vent New Wind. Développé en Israël par la société Sologic, l’e-Tree est capable de produire de l’électricité photovoltaïque mais offre également d’autres services comme le Wi-Fi, des mini-bornes de recharge pour smart phones, de l’eau fraiche pour les humains et les animaux. L’e-Tree sera déployé dans le monde selon les ambitions de Sologic née dans la « Start-up Nation ». Les associations françaises ELNET France et le Forum International des Technologies de Sécurité (FITS) ont tenu en mai dernier la première conférence Safe & Smart Cities à Tel Aviv. Cet événement a été co-organisé par David Harari, co-président israélien du Haut conseil qui fait la promotion des partenariats entre la France et Israël sur la recherche universitaire.
L’E-tree est l’une des solutions démontrant la création de synergies et la volonté des deux pays à travailler ensemble sur les smart cities. L’E-tree sera dans ce contexte testé sur le sol français.
Photosynthèse & stockage d’énergie photovoltaïque
Selon un rapport, des chercheurs de l’Université de Californie à Los Angeles (UCLA) auraient trouvé un procédé imitant le processus de photosynthèse des feuilles pour stocker de l’énergie solaire produite par les cellules des panneaux solaires pour une durée de deux semaines. Ce processus est intéressant pour réduire les coûts de production des panneaux solaires constitués de silicium qui est une matière première coûteuse. L’objectif des chercheurs est de remplacer le silicium par des cellules organiques qui serviront à réorganiser les cellules au sein des panneaux solaires et de fonctionner comme une feuille. Sachant que le stockage de l’énergie est d’un enjeu majeur pour le secteur énergétique en pleine mutation vers un système décentralisé impliquant énergies renouvelables et smart grids, cette découverte pourrait être d’un intérêt majeur pour les énergéticiens, particuliers et autres acteurs hybrides qui percent sur ce marché prometteur.
Le thon, la chouette et le papillon, les modèles hydroliens, éoliens et photovoltaïques de la nature
À Sydney en Australie, l’entreprise BioPower a développé un système inspiré du mouvement d’une queue de thon pour produire de l’énergie marine. Positionnées sur des supports permettant une rotation à 360°, les structures prennent la forme d’une queue de thon et se trouvent dans un milieu marin où les courants sont observés. Le BioStream oscille et produit ainsi un mouvement mécanique qui fait tourner une turbine pour produire de l’électricité. Le BioStream est accompagné d’un système intelligent embarqué qui le permet de s’adapter au courant et de positionner la queue pour optimiser les mouvements.
Des chercheurs de l’Université de Cambridge se sont eux inspirés du plamage d’une chouette pour réduire les nuisances sonores des éoliennes. La particularité des plumes des chouettes fait que leur revêtement permet d’atténuer le bruit de l’air contre leurs ailes quand elles volent. Les chercheurs ont donc reproduit ce modèle de la nature avant de l’appliquer aux pâles d’un prototype d’éolienne en activité. Même si l’expérience n’a pas été effectué sur une structure grandeur nature, les résultats sont très bons et l’amélioration de cette technologie est sur la bonne voie.
Le papillon est l’une des plus récentes sources d’inspiration des chercheurs du secteur de l’énergie. Ils ont trouvé que la posture des ailes du papillon « piéride du chou » pouvait augmenter l’exposition de leurs muscles de vol au soleil en positionnant leurs ailes avec un angle optimal de 17°. Les chercheurs ont aussi trouvé que la disposition des écailles sur les ailes du papillon en question permettait une meilleure efficacité de la réflexion de la lumière. Selon Tapas Mallick, un des auteurs de cette étude, « le biomimétisme en ingénierie n’est pas nouveau. Cependant, cette recherche véritablement pluridisciplinaire montre des voies pour développer de l’énergie solaire à faible coût qui n’ont pas été explorées auparavant ».